Journal 2019 : Chant des jours [septembre 2019]

 

 
 
 

« L’écriture n’est pas un but en soi, mais une façon de chercher et de dire le sens même de la vie individuelle ou collective. »

 

Francis COMBES, Préface de Ce que signifie la vie pour moi de Jack LONDON.

 


 
 

Journal 2019 : Chant des jours [Septembre 2019]

 

 
 

 

« Écrire, c’est hurler sans bruit. »

 

Marguerite DURAS

 

 

« Si tu n’arrives pas à penser, marche.

Si tu penses trop, marche.

Su tu penses mal, marche encore. »

 

Jean GIONO

 

 

 

« L’écrit çà arrive comme le vent, c’est nu, c’est de l’encre, c’est l’écrit, et çà passe comme rien d’autre passe dans la vie, rien de plus, sauf elle, la vie»

 

Marguerite DURAS

 
 

 
 

Jeudi 26, vendredi 27, samedi 28, dimanche 29 septembre 2019

 
 
 

Annie Siozard : ma cousine est comme une rose

 
 
 

Il y a une semaine déjà, Marie Annick et moi prenions le TER à Saint-Astier pour Bordeaux, puis Pessac. Annie nous attendait à la gare de cette banlieue agréable, aérée, calme la majorité du temps.

 

     
     
 
Germaine Joubert-Lacoste   Henri Lacoste
     
     

 

     
     
 
Germaine Lacoste née Joubert  

Madame Bernard, Jean-Paul Bernard (bébé)

Aimée Joubert, Germaine Lacoste

     
     

Annie Siozard, née Lacoste est la dernière des enfants de Jean Henri Olivier Lacoste (Notre-Dame-de-Sanilhac, 27 novembre 1890-28 Février 1938) et de Germaine Joubert (Creyssensac-et-Pissot, 4 avril 1899-20 janvier 1971). Germaine était une des sœurs de mon grand-père Raoul Jean Gabriel Joubert (Creyssensac-et-Pissot, Dordogne, 8 octobre 1900-Paris, 23 septembre 1939). En réalité, ma grand-mère Marie Rosalie Geoffre (Thenon, Dordogne, 4 septembre 1903-Périgueux, 17 février 1981) avait eu mon père avec un capitaine de l’armée originaire de Thenon qui n’a jamais souhaité reconnaître, ni voir son fils, ce qui fut la grande affliction de mon père. Ma grand-mère épousa, le 21 juin 1926, Gabriel, ils eurent un fils, Michel Jean (Périgueux, 4 avril 1927-Périgueux, 3 août 1928), qui ne vécut qu’un an. C’est alors que Gabriel adopta mon père André (Thenon, 24 avril 1922-Coulounieix, 20 février 1991). Gabriel mourut prématurément à 39 ans, victime d’une sorte d’effondrement après avoir été témoin d’un accident particulièrement violent : un homme fut décapité par un ascenseur devant ses yeux. Ma grand-mère veuve, se remaria quelques années plus tard avec Roger Andreaux et élèvera ses deux derniers enfants Christian et Renée.

 

 
 

Jean Gabriel Joubert & Marie Rosalie Geoffre-Joubert

 
 

 

     
     
 

Jean Gabriel Joubert & André Joubert

  Marie Rosalie, Jean Gabriel et Aimée Joubert
     
     

 

 

Germaine et Gabriel avaient deux sœurs Jeanne Léa (1895-1993, mariée Queylat), Marie Aimée (célibataire, 1897-1992).

 

Henri Lacoste disparaît en février 1938 des suites de ses blessures de guerre, huit mois après la naissance de sa dernière fille Annie (12 avril 1937, à Périgueux). Le premier enfant, du couple, Jeanine (14 juillet 1922-3 février 2012), fut suivie par Jean (Jeannot, 10 avril 1924-janvier 1997) et Claudette (7 juin 1927).

     
     
 
Jeanine Lacoste   Raymond & Jeanine Poussou
     
     
     
     
 
Jeannot Lacoste jeune homme   Jeannot Lacoste dans son atelier
     
     

 

     
     
 
Claudette Lacoste   Claudette & Jacques Beyssac
     
     

Malgré la mort prématurée de Gabriel Joubert, ma grand-mère et son fils furent complètement adoptés par la famille Joubert. Aimée vivait avec sa sœur Germaine devenue veuve en 1938 et l’aidait au mieux pour l’éducation de ses quatre enfants. Comme nous, ils habitaient La Cité Bel Air, à Boulazac, rue de la Somme, non loin d’une petite chapelle qui m’attirait beaucoup. Mes parents, mes sœurs et moi, nous vivions rue des Américains, aujourd’hui devenue rue John Kennedy. Si notre père avait des contacts avec l’aînée, Léa et ses enfants, c’était surtout avec Aimée et Germaine et ses quatre enfants que les relations furent étroites. Mes souvenirs de vacances me permettent de me remémorer le rituel hebdomadaire du cimetière Saint-Georges où se trouve la tombe Joubert (qui sera mon ultime destination), qui à l’époque était la sépulture de son époux Gabriel et de ses parents Joseph et Marie, visite qui toujours se poursuivait par une visite à mes deux grands-tantes avant de reprendre le bus pour regagner la route de Paris puis la Villa Élina, rue Jeanne d’Arc.

 

     
     
 
Aimée Joubert   Aimée Joubert, couturière, au centre
     
     

 

 

     
 

Soulac-sur-Mer, 1953 : de gauche à droite, Jeanne Léa Joubert-Keylat,

Marie Aimée Joubert, Brigitte & Josette Keylat,

Germaine Joubert-Lacoste, Annie Lacoste

 

Cité Bel Air : les trois filles Joubert : de gauche à droite

Germaine Lacoste, Léa Keylat, Aimée Joubert

     
     

C’était dans les années cinquante et soixante une époque paisible et chaleureuse. J’aimais particulièrement Tata Germaine qui était la bonté même, attentive, généreuse bien que vivant très modestement et qui souffrait du cœur.

 

Vers l’âge de quatre ans, j’avais probablement fait une bêtise (je dois reconnaître que j’étais particulièrement inventif), ma mère se fâcha contre moi et me dit : « Je ne veux plus te voir ». Je décidais donc d’aller chez ma grand-tante Germaine, rue de la Somme, qui fut tout de même un peu surprise de me voir arriver seul, si jeune. À l’époque les automobiles étaient rares. Lorsque je lui eus expliqué la raison de ma fugue, elle dépêcha Annie pour rassurer ma mère. Cependant je restais dîner chez ma tante sans les limitations habituelles imposées par ma mère. Finalement le changement de lieu, d’ambiance et de menu n’était pas pour me déplaire, mais au contraire propice à la découverte et à la gourmandise. Annie me raccompagna ensuite jusque chez mes parents. Elle dit que cela ne m’avait pas fait mal d’enfreindre les dictats alimentaires de ma mère, mais la réalité rapportée par ma mère est tout autre : je fus malade et vomissais d’indigestion dans la nuit… mais c’était juste pour lui faire plaisir et qu’elle n’aille pas s’imaginer que je l’avais trahie outre mesure en me réfugiant chez ma bonne tata Germaine !

 

La petite chapelle de la rue de la Somme, fort modeste il est vrai, avait trouvé grâce à mes yeux, il y avait la Sainte Vierge dont on ne voyait que des statues, une abondance de fleurs blanches de préférence, les habits du prêtre, une ambiance féerique, un peu comme une pièce de théâtre. Nous ne connaissions pas encore le mirage de la télévision et n’allions pas dans les théâtres, réservés à une bourgeoisie dont nous n’étions pas. Entre dix et douze ans j’étais fasciné par les messes du mois de Marie. On pouvait penser avec ébahissement, mes parents les premiers, pas vraiment croyants, que j’allais avoir une vocation de Prêtre, c’était plus probablement une vocation d’artiste ! Un peu plus tard La Belle Hélène ou La Périchole me feraient un effet tout aussi électrisant. Pourtant rendez-vous fut pris pour une visite de l’Abbé Barret, aumônier du Lycée Bertran de Born, afin d’envisager Le Petit Séminaire. Ma primo-infection me priva d’entrer dans cette Troupe de théâtre, l’Abbé eut sans doute peur et ne vint pas ! Très longtemps après, alors que nous trouvions réunis après le décès du père d’un ami de jeunesse, je lui fis part que sa défection m’avait entraîné assez loin de l’Église Catholique. Il me répondit : « Vas-tu me provoquer en duel ? ». C’était l’acte trois de cette pièce de théâtre tragi-comique. Finalement, il est mort début 2019. Ainsi finit la comédie…

     
     
 
Annie et sa mère Germaine Lacoste   Annie Lacoste
     
     
     
     
 
Annie Lacoste
     
     

 

 

 

Annie a donc dix ans de différence avec moi. Elle est la seule des quatre enfants de Germaine et Henri à avoir eu une descendance. En 1955, Annie avait 18 ans, elle était de toute beauté, suivait les cours Pigier à Périgueux où elle côtoyait un jeune homme très charmant de 16 ans, Michel Siozard. Ce jeune homme avait une excellente vue et il fut vite amoureux d’elle ! Les parents de Michel tenaient un magasin de vêtements rue André Saigne et Annie travaillait aussi, en dehors de ses cours, chez sa sœur Claudette Beyssac, dans la pâtisserie très chic qui faisait le coin de la rue Taillefer et de la rue Aubergerie. Michel trouvait du plaisir à apercevoir Annie sur son chemin de retour. Les deux sœurs étaient deux des grandes beautés de Périgueux. Si on se pressait dans cette pâtisserie c’était pour se régaler mais aussi pour se rincer l’œil. Honnêtement c’était plus passionnant que les excellentes pâtisseries de Jacques Beyssac, une crème d’aguicheur. Jeunes on pense à autre chose qu’aux sucreries que l’on abandonne volontiers aux mémères sur le déclin… excellent lot de consolation !

 
 
Annie Lacoste & Michel Siozard
 
 

 

 
 
 
Mariage d’Annie & Michel Siozard 
 
     
 

De gauche à droite : Grand-père Émile Siozard, Raymond Poussou, Aimée Joubert,

Martine & Jacqueline Cuménal, Jeannot Lacoste

 

Annie et ses demoiselles d’honneur :

Jeanine Laforêt, Brigitte Keylat, Annie Lacoste, Christine (Titi),

Bernard, Josette Soulier

devant à gauche : Christine Joubert & Martine Cumenal

     
     
     

Annie et Michel formaient un très beau couple qui se remarquait. Un vrai couple, une relation forte pour la vie. Ils se marièrent et eurent deux beaux garçons, sérieux et parfaitement bien élevés : Jean-François (27 décembre 1962) puis quatre ans plus tard Alain (5 mars 1966).

     
     
 

Annie Siozard-Lacoste avec

son fils Jean-François

 

Germaine Lacoste, Aimée Joubert

Alain & Jean-François

     
     

 

 

     
     
 

Périgueux : Claudette Beyssac-Lacoste

Alain & Jean-François Siozard

 

Le Change : Alain Siozard

Raymond Poussou

     
     

Ils habitèrent assez longuement Bassillac, près de Périgueux, où ils élevèrent leurs fils. Mon père, parrain d’Annie, leur rendait visite. Puis ils prirent un bar à Pessac où ils se fatiguèrent beaucoup mais où comme disait Michel, ils voyaient toutes sortes de personnes, de l’intellectuel au paumé, et ce fut une opportunité pour observer le large spectre de l’univers humain.

 

 
 
Annie & Michel Siozard dans leur bar-brasserie à Pessac
 
 

Avec Annie et Michel nous avions des échanges internet ou téléphonique de manière discontinue mais toujours chaleureux. Lorsque ma mère nous a quittés en septembre 2010, j’ai reçu un CD-Rom en forme de condoléances et d’accompagnement dans ce deuil. Michel avait mis en ligne sur son blog certains de mes textes et des photos du jardin. C’était en fait, maintenant que j’y pense, les prémices de ce que je fais aujourd’hui avec Le Jardin d’Épicure. Ces cousins souhaitaient garder le contact, Annie appréciait beaucoup mon père et c’était hautement réciproque. Il faut dire d’Annie qu’elle est la gentillesse même, la douceur, l’affection. En cela elle ressemblait, plus que ses soeurs et son frère, à sa mère, Germaine. Il était facile de l’aimer pour sa grâce, sa nature heureuse et son attention aux autres, une très grande simplicité comme seuls les vrais êtres humains en ont. Aucun déguisement, il lui suffisait d’être belle physiquement et moralement… un peu comme une rose s’y emploie, avec naturel.

 
 

Les 90 ans d’Aimée Joubert

de gauche à droite : Claudette Beyssac, Jeanine Poussou, Annie Siozard, Jeannot Lacoste

 
 

 

Aussi, l’éloignement de leurs deux fils si charmants ne trouvait pas d’explication. Un silence de plus de dix ans. L’enfer pour les parents. Je me suis beaucoup interrogé sur cette situation, sauf à avoir vu la même chose chez certains autres de mes cousins aussi adorables soient-ils. Je suis consolé d’être sans enfants, parce que je n’aurais pas bien vécu ce genre de distance ou de rejet.

 

Ces dernières années, les soucis de santé n’avaient été épargnés ni à l’un, ni à l’autre. Cela en était même impressionnant. Annie a subi plus de trente interventions chirurgicales lui rendant la position debout et la marche délicates. Michel aussi traversait les turpitudes de plusieurs problèmes de santé qui se conjuguaient défavorablement. Toutefois, ils avaient une alimentation saine, une vie calme et une hygiène de vie surprenante. Michel, malgré les troubles occasionnés par la maladie du siècle, se donnait pour objectif de marcher presque deux heures pas jour sur 7 à 8 kilomètres. Un vrai défi.

 

 
 
Michel Siozard
 
 

 

Vers le 15 janvier 2018, Annie m’informa que Michel venait d’être hospitalisé et que sa santé devenait préoccupante. Au point qu’il disparaissait fin janvier après deux semaines particulièrement impitoyables.

 

Naturellement nous communiquions à ce moment-là plus intensément. Annie avait quelques amies, peu de famille et se trouvait seule dans l’impossibilité de contacter ses deux fils.  Nous avions parlé d’Alain qui habitait dans la région Bordelaise ; le médecin avait conseillé à Annie de prévenir ses enfants du caractère transmissible d’une des pathologies de Michel.

 

Nous avions décidé de nous retrouver chez elle, à Pessac. C’était le 21 février 2018. Tout au long du voyage je réfléchissais à sa situation et à rechercher ce qui pourrait le mieux l’aider dans cette épreuve. Ce qui revenait le plus souvent, c’était l’éventualité de retrouvailles avec ses deux fils. Rien n’est plus précieux pour une mère que le soutien de ses enfants si longuement chéris. Moi qui avais oublié la prière, j’en étais à effleurer son principe pour réclamer pour Annie cette bénédiction. Après une péripétie survenue sur la ligne du tram que je pris dans le mauvais sens, j’arrivais inquiet devant sa porte. Je sonnais et qui m’ouvrit ? Alain en personne. Non seulement elle avait retrouvé son fils, mais aussi Quentin, son petit-fils qu’elle n’avait pas vus depuis dix-sept années, dix-sept longues années. Lorsque nous nous mîmes tous les quatre autour de la table j’eus cette réflexion : « Il ne manque que Dieu autour de cette table ! », tant tout me paraissait incroyablement idéal, alors que la vie l’est, habituellement, si peu.

Quentin veut être cinéaste, il est tout le portrait de son père en plus réservé. Ainsi Michel trouve en lui un reflet de ce qu’il fut jeune homme. Il est vrai qu’Alain lui ressemble particulièrement. Pour moi, c’est Michel qui de sa résidence spirituelle a voulu ces retrouvailles et qui les a offertes à sa tendre moitié qui se trouvait dans l’épreuve d’une séparation particulièrement douloureuse. Il a fait en sorte que son départ un peu brutal soit plus supportable pour celle qu’il a aimée depuis ses 16 ans.

 

Alain a pleinement retrouvé la porte et le cœur de sa mère qui le mérite tant. Tout le monde n’a pas une mère et une grand-mère, Germaine, aussi aimantes. Annie n’est plus seule dans sa solitude qu’elle retrouve cependant souvent le soir après les activités de la journée. Alain l’appelle, vient lui rendre visite, l’invite aux fêtes familiales, l’amène en voyage… Enfin, je peux dire que mon espérance a été idéalement exhaussée, me sentant en droit de crier Alléluia ! Car cette fois c’était pleinement justifié.

 

 

Ce jeudi 19 septembre 2019, Annie voulut nous inviter Chez Léon de Bruxelles. J’ai tant mangé de moules qu’il n’y avait plus de place dans mon estomac gargantuesque. Mais moules frites est un de mes péchés mignons. Il faut dire qu’une de mes relations dans les années 80 avait été restaurateur en Belgique et que c’était une de ses spécialités. Lorsqu’il m’annonça ce menu un jour où je passais chez lui à Saint-Pompon, je lui demandais s’il n’avait pas autre chose à me proposer, effrayé par ce mélange qui me paraissait peu orthodoxe. Il me dit : « Goûte d’abord et puis ensuite si vraiment ça ne te plait pas, je te ferais autre chose. » L’alternative ne fut pas nécessaire, pour la première fois de ma vie je me régalais de manière totalement inattendue ! Depuis, si j’ai le choix, je ne préfère pas autre chose. Et Chez Léon, qui est un spécialiste européen de la moule, on est servi royalement. Marie Annick préféra du poisson et se régala tout autant que je le fis, Annie, elle avait commandé des moules à la moutarde. Curieux, j’en goûtais une, pas plus, là je n’étais nullement convaincu !

 

 
 

Annie Siozard & Jean Alain Joubert

devant la brasserie Léon de Bruxelles

photo Marie Annick Faure

 
 

 

     
     
 
Moules à toutes les sauces © Marie Annick Faure   Le plein de moules © Marie Annick Faure
     
     

 

     
     
 

Annie et ses moules à la moutarde

Photo Marie Annick Faure

  Dessert glacé © Marie Annick Faure
     
     

 

Nous avons passé une très agréable journée avec ma chère cousine et pour finir nous avons regardé toutes les photos de famille dont elle est dépositaire et j’eus le privilège d’en emporter, selon mon choix, un gros paquet que je commence à scanner, nettoyer et restaurer. Ainsi le grand album familial s’édifie semaine après semaine. Personne ne devrait être oublié. J’ai vraiment du plaisir à redonner vie à tout ce monde qui fut le mien et qui fut bon pour moi et les miens en des temps plus difficiles qu’aujourd’hui. Et cette tendresse est toujours d’actualité !

 

Les cousins heureux de l’être © Marie Annick Faure

 
 
 

 

Si nos morts nous voient, ils ne devaient pas être mécontents de cette rencontre lors de laquelle ils furent évoqués et purent se sentir aimés. J’ai tant de cousins auxquels nous ne prenons pas toujours, ou assez, garde… bien qu’ils soient tous très attachants. Et la belle et douce Annie est certainement une des plus délicieuses roses qui fleurit sur notre arbre généalogique ! ♦

 
 
 

 

 
 

Mardi 17 septembre, dimanche 22 septembre 2019

 
 
 

Mon frère, Blaine A. Mero

 
 
 

 

 

Tout récemment je recevais de Blaine A. Mero, une jolie carte par voie postale avec ces simples, mais très explicites mots : Jean Alain, I love you and wanted you to know, Blaine.

 

S’il y a quelqu’un de véritablement gentil au monde c’est Blaine. Comme mon merveilleux grand-père et parrain, voilà les deux plus aimables personnes que j’ai eu la chance de rencontrer dans ma vie. Sans doute, est-ce la résultante de l’amour des autres qui les anime. Les hommes en général sont peu disposés à la tendresse, elle m’échappe, alors que Blaine l’exprime en permanence. Il suffit d’observer la foule d’amies qui l’entourent de leur affection. De celui-ci on se souvient, il ne s’oublie pas en vertu de l’excellent souvenir qu’il laissa à Périgueux, mais encore en raison  de son affectueuse fidélité au cours du temps qui vient de s’écouler fort libéralement : quelque chose comme quarante trois années.

 
 
Blaine A. Mero, 1975
 
 

 

La maladie le retient par des soins contraignants[1] en Alaska où il travaille et réside, sinon il serait revenu ici semer encore, avec son sourire enfantin, mille graines d’attention, de bienveillance et de bonheur.

 

Périgueux fut sa première affectation lorsqu’il arriva en France. En général, ce n’est pas le lieu préféré des missionnaires, à cette époque en tout cas, car à la fin des années 60, une apostasie initialisée par les missionnaires de Périgueux avait eu un impact sur les missionnaires et les membres de toute une partie de France. Un apôtre fut dépêché qui procéda à un grand nombre d’excommunications ! Être affecté à Périgueux avait, comme l’avoue Guy Moran, un goût de punition !

 

Blaine en eut une toute autre vision. Ainsi il m’écrivait récemment : « Tu es, mon ami, l’un des hommes les plus gentils que je connaisse et je suis tellement heureux que tu aies été à Périgueux quand j’y étais. C’était ma première ville et ma préférée de toute ma mission. Nous avons noué des liens avec les autres Anciens et les membres de la branche. C’était une période merveilleuse… »

 

     
     
 
Impasse Michelet, Périgueux, 1976   Blaine à Périgueux, 1976 avec une de ses réalisations
     
     

 

Pourtant, fin décembre 1975, mon retour de mission à Périgueux n’était sans doute pas exaltant pour les missionnaires affectés dans cette ville. Je ne répèterai jamais assez que ce ne sont pas les conditions de vie d’un missionnaire qui peuvent en expliquer les raisons, mais un très défectueux fonctionnement hépatique, que le Professeur Traissac de Bordeaux (spécialiste des voies digestives) allait détecter et soigner efficacement durant l’année 1976. En tout cas pour Blaine Mero et Wallace Taylor le spectacle d’un garçon de 28 ans totalement épuisé et ne pesant que 35 kgs n’avait pas de quoi les stimuler dans leur propre engagement. Pourtant, ils furent tous les deux pleins d’attention pour moi et assez vite je repris possession de ce corps délabré, par contre une amnésie substantielle demeura. Les autres missionnaires, dont Bruce Beamer, furent aussi attentifs et bienveillants, mais moins proches.

 

 

 

Blaine était comme moi nettement plus petit que nos amis américains dans leur large majorité, il était canadien et ressemblait plus à un adolescent qu’à un jeune adulte. Il avait un beau sourire enfantin, plein de bonté, dont il ne se départait jamais. Il vous accueillait toujours ainsi, comme seul un enfant ravi de vous voir peut le faire. Il fut le bon ange de mon retour qui se fit dans un certain désarroi (général pour tous les ex-missionnaires dont le changement complet de rythme de vie réclame un temps d’adaptation). Quand le soutien d’une bonne vitalité n’est pas là, c’est d’autant plus difficile.

 

 
 

Pique-nique aux Petites-Brandes, Coulounieix

avec Christine Jensen, Caroline Subrenat, Blaine Mero, Wallace Taylor, Bruce Beamer…

 
 

 

Nous eûmes vite un point commun, notre admiration pour Randall K. Bennett devenu un des Assistants du Président de la mission française de Toulouse et que pas un seul missionnaire n’eut apprécié d’avoir pour compagnon de travail. De par son humilité, sa discrétion, sa bienveillance, sa courtoisie, Randall incarnait l’exemple idéal d’un missionnaire de l’Église de Jésus Christ des saints des derniers jours. Lorsque Randall et mon ultime compagnon à Toulouse, Jeff Smith (un garçon très sympathique), devenu le sien, venaient soutenir l’équipe de Périgueux, j’avais droit à une petite visite de réconfort comme en atteste quelques photos.

 

     
     
 

Visite des Assistants : Jeff Smith, Randall Bennett

Les missionnaires de Périgueux

 

Président Broschinsky et un groupe de missionnaires

dont Blaine Mero et Bruce Beamer

     
     
     

 

Je me souviens que Blaine parlait avec passion de ses expériences d’acteur dans les ateliers d’étudiants, il possédait un tempérament affectif et artistique. On sentait son puissant désir d’être aimé et il l’était. Il avait en plus un superbe coup de crayon et il réalisa toute une série de panneaux pour faire connaître l’Église sur le motif très porteur à l’époque d’Astérix et Obélix. C’était un beau travail dans le style de celui que nous avions réalisé, fin 1974, à l’occasion de la Foire Exposition de Bayonne avec mon compagnon, Chris Breivik, qui lui aussi ne jouissait pas d’une excellente santé. Mais cette fois, c’était la créativité et les qualités graphiques de Blaine qui firent tout l’intérêt de cette réalisation. Les tableaux furent exposés sur les boulevards de Périgueux et permirent aux missionnaires de parler de l’Église avec les périgourdins, en dehors de la contrainte formelle du porte à porte, froide et assez rébarbative. C’était, je trouve, une approche avenante et intelligente.

 

         
         
   
 
Présentations de l’Église avec les dessins de Blaine Mero, Blaine et Wallace Taylor, en direct sur les boulevards à Périgueux, 1976
         
         

 

Avec le départ de Blaine, les discussions que j’avais avec Thierry Naudou, mon collègue de bureau, les lectures de Hermann Hesse et de Jiddu Krishnamurti, m’éloignèrent ostensiblement de l’Église qui ne répondait pas ou plus à tous mes questionnements. Certes Blaine en fut témoin, mais jamais son affectueuse amitié ne me fit défaut et demeure à ce jour intacte. Il est avec Guy Moran mon plus fidèle ami rencontré grâce à l’Église. On oublie trop souvent la qualité de ces rencontres inattendues, improbables qui jalonnent toute une vie, plus encore, bien entendu, lorsque toute notre vie se construit dans l’appartenance à l’Église.

 

Pour évoquer vraiment Blaine, je crois que rien de plus évocateur n’a été écrit que ce qu’il affichait tout récemment sur sa page Facebook, sous la plume de Christophe André :

 

« Je crois en une contamination de l’amour, de la bienveillance, de la douceur et de l’intelligence. Chaque fois qu’on pose un acte de tendresse, d’affection, d’amour, chaque fois qu’on éclaire quelqu’un en lui donnant un conseil, on modifie un tout petit peu l’avenir de l’humanité dans le bons sens[2]… » ♦

 

[1] Message de Blaine du 16 septembre 2019 : « Ma santé est stable en ce moment. Je vais à Seattle pour voir mon oncologue et d’autres médecins à la fin du mois d’octobre et j’en saurai plus à ce sujet. Je ne sais pas trop à quoi ils pensent car je ne les ai pas vus depuis 6 mois, mais je me sens plutôt bien et je travaille à temps plein, en prenant un jour à la fois. »

[2] Christophe André, Matthieu Ricard, Alexanre Jollien, Trois Amis en quête de sagesse, L’Iconoclate, Allary Éditions, 2016.

 

 

 

 

 
 

Vendredi 13, dimanche 15 et lundi 16 septembre

 

 
 
 

Jean-Claude Aunet et la dynastie Rivière

 
 
 

 

Nous nous étions promis de nettoyer le caveau de nos arrière-grands-parents à Eyvirat. Pierrette, Jackie et moi-même nous nous y employions sous un ciel de fin d’été, jeudi en matinée.

 

 
 
La maison face au cimetière où fut élevé notre arrière-grand-père, Jean Rivière © Pierrette Martinet
 
 

 

Entre deux haltes à la Clinique du Parc à Périgueux, où Pierrette conduisait une de ses voisines et amies, nous relevions le défit avec entrain et bonne humeur.

 

Je fus ému par la petite table de Jackie prévue pour déjeuner au cimetière, un lieu aussi ensoleillé que les plages du littoral, mais pas aussi silencieux que l’endroit voudrait le laisser penser ; en effet, le mitoyen est venu nous faire pétarader sa débroussailleuse dans les oreilles de peur sans doute que l’on se prenne de passion pour ses pêches de vigne. La courbure des branches présageant une abondante récolte. Mais nous avions la pêche sans en consommer !

         
         
   
 
La descendance Rivière en action au cimetière d’Eyvirat © photos Pierrette Martinet & Jackie Clément
         
         

Pierrette, que je fis perdre dans la descente de Champcevinel jusqu’à nous retrouver au Toulon, devant chez Hubert Girardeau, fit halte sans que nous ne le sachions chez un descendant de la famille Nouaillane, boulangerie, pâtisserie ‟Les délices de Sylvain” à Agonac, après nous avoir, en définitive, avec son joyeux toupet, invités tous les trois chez Jean-Claude Aunet, pour le repas de midi.

 

Jean-Claude est presque l’aîné des Rivière, de ceux du Prat, des limogés du lieu par Marie la sordide ; misérable héritière puis dilapidatrice des économies des vieux Rivière et de leur noble fils Henri. Marie fut la honte de la famille. Nous ne ferons dire aucune messe pour son salut !

 

Jean-Claude appréciait la compagnie des enfants de Paul et Christiane Rivière, lorsqu’ils demeuraient au ‟Prat” d’Eyvirat. Bien qu’adultes aujourd’hui, parents et grands-parents à leur tour, il les considère comme sa propre famille. Et c’est Jeantou, Pierre et Pierrette principalement mais pas uniquement qui font le siège du ‟Clou” pour y partager leurs souvenirs de ce temps joyeux de l’enfance où cependant le pain et le lait des vaches de la famille Aunet pouvaient parfois un peu mieux combler les estomacs un peu creux, de cette marmaille qui vivait souvent de bien peu.

 

Pierre semble tout particulièrement avoir une complicité avec Jean-Claude ce qui lui permet d’en savoir plus que ses frères et sœurs sans trop l’évoquer en dehors de ces lieux. Je souffle un peu tempête avec mon enquête qui ressuscite bien des aspects un peu troubles de cette épopée. Ce qui touche chez le fils Aunet, c’est sa simplicité, sa modestie, son humilité et son grand coeur. J’imagine sans peine qu’il est à l’image de ce que furent ses parents, de vrais braves gens comme il n’en existe plus guère. À chaque visite, s’exprime le bonheur de retrouver ses anciens voisins qui sont partis du ‟Prat” à l’automne 1966. Cela fait tout de même un bail et ne faut-il pas une grande nostalgie et une vraie affection pour que, plus de cinquante ans après, les incessantes visites depuis le lointain bergeracois se manifestent avec une telle régularité, une aussi impérieuse fidélité ? Cette nécessité ressentie par chacun des frères et soeurs se produit comme dans le secret d’un confessionnal, chacun voulant sa propre complicité avec Jean-Claude, l’ami idéal. Dans les étincelles qu’il a dans les yeux, on devine que ‟Loulou” est revenu aux heures heureuses de l’âge tendre, et des moments qu’il avait partagés avec cette joyeuse fratrie.

Je l’interroge sur le malheureux Gaston, notre grand-oncle, le plus inconnu des Rivière initiaux (les enfants de Jean Rivière et de Françoise Parcellier). Ce personnage atypique, au caractère chatouilleux, disait ma mère, repose depuis 1987 dans le caveau familial à Eyvirat. Sa vie quelque peu vagabonde, arrosée outre mesure peut vouloir conduire à le tenir à l’écart des réunions et fêtes de famille. Personne n’ayant trop de souvenirs de lui, on peut supputer que ce fut bien le cas. Jean-Claude nous le décrit comme ouvrier agricole, louant ses services aux uns et aux autres, logé dans l’étroite rue du commerce d’Agonac. Au-dessus de lui habitait son camarade assoiffé, Greuilh. Dans cette rue de solitaires, il y avait parfois de la joie et des éclats de voix. Au demeurant, Jean-Claude le décrit comme un gentil garçon, ainsi que furent ses trois frères. Si sa sœur Clotilde le regardait d’un mauvais œil, nous, nous l’aimons tel qu’il était : libre, pauvre, totalement insouciant, peut-être même un peu irresponsable. Il aura terminé sa vie dans un hospice à Sarlat, démuni qu’il était de revenus sérieux, mais il a vécu comme les oiseaux des champs et au temps de sa jeunesse cette liberté, si rare, fut un privilège. Sans doute la famille lui avait tourné le dos, ce qui n’était pas très chic… mais la rigueur, le volontarisme du vieux Rivière interdisait tout dilettantisme. Sans doute l’ai-je vu aux jours de vendanges à Saigne Bœuf, sans trop faire la différence avec tout ce monde qui participait à ces festivités et avec lesquels je n’avais pas de réelle proximité.

 

 
Chez Jean-Claude Aunet. Le tourin à la tomate avec ma cousine Jackie Clément © Pierrette Martinet
 
 
 

 

Lorsque nous arrivâmes chez Jean-Claude, les faitouts et l’ancestrale cocotte frémissaient sur les feux. Quel menu inattendu et savoureux, il s’ouvrit avec un tourin à la tomate et au vermicelle comme autrefois chez mémé Clotilde. Je fis même chabrol avec notre hôte, mais il remarqua bien que je n’avais pas retourné la cuillère à soupe dans l’assiette pour que soit respecté le niveau de piquette des vrais de vrais de chez nous ! De délicieuses palombes chassées ce dimanche accompagnaient les petits pois comme en un jour de fête. Fromage et tarte aux pommes de Sylvain Nouillane nous mirent en forme pour un retour serein. Mais Jean-Claude comme toujours tourne le dos lorsque nous le quittons. Retrouver sa solitude le rend maussade sur cette vaste propriété où les visites ne sont pas si nombreuses. Il fallut embrasser Jackie qui nous suivit cependant jusqu’à Agonac, peut-être pour visiter la fameuse rue du Commerce dans laquelle vécut notre grand-oncle ? Il nous fallait rejoindre la Clinique du Parc à Périgueux.

 

Moi-même, cette fois, je fus triste de devoir quitter un personnage aussi unique par sa gentillesse, sa disponibilité et son sens des autres. Ce jour consacré à nos aïeux, fut grâce à Jean-Claude, à mes si charmantes cousines, un des beaux souvenirs de l’an 2019. Merci. ♦

 
 
 

 
 

Samedi 7, dimanche 8 septembre 2019

 

 
 
 

Réflexions sur les temps présents

 
 
 

Pascal Fournet reprend sur Facebook cette réflexion du pape François, concernant l’homosexualité :

« Il y a beaucoup à faire du côté de la psychiatrie ! (sic) »

Et Pascal Fournet d’ajouter : « Puisqu’il est sollicité, on attend avec impatience le diagnostic du psychiatre sur le cas de ce vieux monsieur parlant à un ami invisible… lequel ami invisible a eu un enfant hors rapport sexuel avec une mère vierge. Enfant qui ressemblerait à l’un des Bee Gees, marcherait sur l’eau, changerait l’eau en vin, multiplierait le nombre de pains, et serait ressuscité une fois mort… ! »

 

Personnellement, il me semble que si nous devions suivre le raisonnement du pape François, que penser de ces incurables pédophiles et autres prêtres homosexuels qui hantent si généreusement nos églises ? François devrait d’urgence songer à nettoyer ses écuries avant d’éructer des insanités réactionnaires, car sinon, une vaste frange du clergé, de sa base jusqu’aux sommets de l’Église, nécessiterait, non pas un pape comme guide, mais un service d’urgence psychiatrique ! Autrement dit, au lieu de regarder la paille dans l’œil de la société, le Saint Père devrait avoir conscience de la poutre qui obstrue le sien !

 

 

Dans le travail de recherche que j’accomplis sur mes ascendants, non comme l’édification d’une généalogie, mais comme une volonté de savoir ce qui se cache derrière nos secrets de famille, je me sens totalement dans l’esprit de la phrase de Jean d’Ormesson : « Il y a quelque chose de plus fort que la mort, c’est la présence des absents, dans la mémoire des vivants. » Curieusement, j’ai assez souvent l’impression d’être le père de mes ancêtres et d’avoir à en prendre soin.

 

Laurent Deloire nous offre un superbe portrait de Cédric Villani qui nous annonce, à la manière de la pétulance d’une bouteille de cidre secouée avant son ouverture, sa candidature à la mairie de Paris en 2020. Il ajoute une légende à sa caricature du folichon :

2017 : En Marche

2019 : En Marge

Me vient l’inspiration d’y ajouter :

2020 : En Marmelade

 

Après Alain Souchon qui « sousoute » son petit Macron, Pierre Arditi déclare au Figaro : « Oui, je soutiens Macron, car il tente des choses et c’est un vrai démocrate. » Cette logorrhée consternante m’inspire ces remarques : « Plus démocrate que Macron, en effet, impossible à imaginer !!!! N’aurais-je pas été informé de ce concours de louanges devant permettre de désigner le français le plus obséquieux et avili de l’année ? ». 

 

 

Par contre la lecture de l’interview de Robert Guédiguian, en compétition à la Mostra de Venise, par Franceinfo Culture, publié le 6 septembre 2019, me comble par sa lucidité.

« Je suis en colère contre le monde dans lequel on vit… et son individualisme forcené. » Comme Ken Loach l’a fait dans son film Sorry We Missed You, « constat des dérives de l’ubérisation de la société, Robert Guédiguian, autre cinéaste social et inlassable militant, fait lui aussi la critique de l’ultralibéralisme dans Gloria Mundi. »

 

 « Je voulais faire une sorte de constat de l’état de guerre dans lequel on est, de tous contre tous… L’ensemble des préoccupations individuelles a pris le pas sur les préoccupations collectives, il n’y a plus de projet d’émancipation, de projet général… ce qui me donne à penser que les gens qui étaient les plus démunis tenaient le discours de leurs exploiteurs, que les esclaves tenaient le discours des maîtres, donc que la bataille était un peu perdue. »

 

« Guédiguian évoque d’ailleurs en plaisantant une ‟Internationale des cinéastes”, dans laquelle il figurerait aux côtés de Ken Loach, des frères Dardenne, de Nanni Moretti ou Aki Kaurismaki, des gens ‟qui ont quand même beaucoup de choses à se dire” » !

 

Entre le concert de louanges fétides de quelques bourgeois satisfaits de peu et surtout du confort de leurs postérieurs, dans l’indifférence de ce qu’il en coûte à une large majorité de français – capables j’en conviens de se rallier misérablement à leurs bourreaux –, et les réflexions pleines de conscience, éloignées d’un narcissisme d’égout, je n’hésite pas une seconde. La palme revient à Bernard Guédiguian, lorsqu’elle n’est pas pour Ken Loach. ♦