René FRÉGNI par Pierre-Yves BESSE
Route du Cailar©Pierre-Yves Besse | ||
Les pépites à spirales
Pierre-Yves BESSE
Juillet 2020
Ce fut comme une trouvaille d’orpailleur
sur les conseils avisés d’une spécialiste
découvreuse de pépites !
– « Y’a de l’or rue Wilson à Périgueux ! » – *
René FRÉGNI se raconte avec l’accent
comme l’ont fait Giono et Chabrol,
chargeant chaque chapitre de senteurs,
de couleurs, de lumières, de saisons,
de sentiments, de vies toutes simplement
décrites.
« L’écriture a changé ma vie, sans plan ni
de suite à trouver.
C’est une sacrée liberté que celle d’écrire
au fil de l’eau, au fil des saisons… écrire
de presque rien ».
Ses récits sont tout aussi troublants, qu’ils
peuvent déborder de tendresse, comme de
violence, en tsunami de vie… la sienne.
(Tiens, il faut que je change la cartouche
de mon stylo.)
Il semble se libérer, c’est tout le symbole
des ateliers d’écriture en prison et
c’est moi qui m’évade… Jusqu’à Banon
par exemple, petit village où un fou
de livres a fait d’une grange en ruine
un temple de la lecture à l’enseigne
d’un bleuet. C’est à Banon que repose
Elzéard Bouffier, l’homme qui
plantait des arbres, que Giono croisa
au cours d’une de ses promenades.
C’est une coïncidence bien venue.
C’est de tout cela dont je m’abreuve
comme au temps plein d’appétit
pour ce genre de récits avec l’ami
Éric qui me donnait la réplique
dans d’interminables discussions,
à en laminer nos nuits.
Sans compter que le personnage
ne manque pas d’étoffe… à se
demander même si certains
récits sont vrais ?
Il a tant fait de ricochets, en aventures
contraintes et improbables, comme le galet
bondissant au travers d’une rivière…
ricochets pour survivre et écrire.
Mais le doute est fugace et je suis
vite subjugué par la sincérité que
je ressens lorsqu’il nous présente son
amoureuse. Il écrit sur elle comme
il m’arrive de le faire : En amour
pour celle qui, elle aussi, s’habille
«d’opium», mais qui serait effrayée
d’un vol d’oiseaux couleur jais, les
pieds dans la neige à grelotter.
J’ai moi aussi acheté des cahiers…
Les lignes bleu et rouge pour la marge
grillagent ainsi mon territoire de mots.
Lui, cela fait plus de quarante ans qu’il
en achète… des cahiers épais… à spirales
comme des pépites que l’on découvre, qui
réveillent les mots :
Comme des PÉPITES à SPIRALES.
Il a cette façon de nous emmener d’émotions
en émotions, en côtoiements insolites de
personnages picaresques, en émotions dans
l’accompagnement de sa mère jusqu’à la
porte ouverte sur l’infini, ainsi que celui de
LILI parti planter des arbres dans les nuages, en
émotions de voir son bébé aux portes de l’université
dans la grande ville d’à côté, en émotions devant
la mort de «Beaumettes» son chat sauteur maladroit
sur son dernier bond…
L’écriture s’avéra radicale, en remède
contre son eczéma invasif, salutaire même,
et son parcours propice à une longue
médication par ordonnances sans cesse
renouvelées.
Cela semble, pour lui, un traitement
à vie et nombreux seront les cahiers
d’écoliers à s’empiler en monument
d’histoires… de son histoire.
Ceci est contagieux, ne prenez
aucune précaution.
* ( Librairie « Des livres et nous » ) |
Photo©Pierre-Yves Besse | ||