IHS CGT 24 : départ de Cyril Moreno, un camarade de valeur

 
 
Fred DOUSSEAU, UD CGT 24
 
 
 

 

IHS CGT 24 : départ de Cyril Moreno, un camarade de valeur

 

Fed DOUSSEAU

Février 2019

 

 
 
 

 

Si il y à 10 ans, à l’aune de mes 40 ans, on m’avait dit : « il faudra que tu fasses un discours pour le départ de Cyril », je crois que j’aurais bien rigolé.

 

Jalousie, orgueil mal placé ? Je n’en sais rien, ce que je sais c’est que si seulement 9 ans nous séparent, ce petit jeune, sûr de lui, voulant tout remettre en cause, m’énervait profondément.

 

J’ai réagi en vieux con, oui je l’avoue. Faut dire que cette attitude de révolutionnaire, plus révolutionnaire que tous, avait tout pour remettre en cause le ronron syndical dans lequel je m’étais sûrement perdu.

 

La confrontation à la réalité, si elle est nécessaire pour connaître le rapport de force qui peut être mobilisé, ne peut rien si elle n’est pas confrontée aussi à de la théorie. Je l’avais oublié, Cyril me l’a rappelé.

 

Il a cette faculté fondamentale, d’énerver ceux qui n’ont pas l’ouverture d’esprit nécessaire pour se remettre en cause. Son coté « bonhomme », gentil, cache une acuité d’analyse lui permettant de faire passer des messages subliminaux ou non, sans en avoir l’air.

 

 

 
Cyril, Julian, Delphine, Hugo
 
 

L’art de dire toutes ses vérités, voilà la grande faculté de Cyril, je dis bien ses vérités car ce n’est pas parce qu’elles sont les siennes, qu’elles sont des vérités absolues. C’est ce qui fait que nous ne sommes pas toujours d’accord, bien que depuis 10 ans, nos affrontements se font plus sur de la théorie, et encore à la marge, que sur les fonds de réalité qui touchent notre syndicalisme.

 

Si affrontement il y a, cela nous reporte à la fin du XIXe siècle et début du XXe siècle, où le mouvement ouvrier, qui ne s’appelait pas encore le mouvement syndical, se cherchait entre indépendance, neutralité, réformisme et révolution.

 

« Il n’y a rien de changé et il ne peut rien y avoir de changé dans la société actuelle tant que la propriété capitaliste n’aura pas été supprimée et n’aura pas fait place à la propriété sociale c’est-à-dire à votre propriété à vous. » Cette phrase issue du discours des deux méthodes (combat oral entre le réformiste Jaurès ‒ eh oui en 1900 il était considéré comme cela ‒ et le révolutionnaire Guesde) pourrait résumer, toute proportion gardée, nos débats. Qui saura qui sera le réformiste et le révolutionnaire ? L’Histoire nous le dira.

 

 
 
 
Avec Cyril et Mathieu, les Onze de la DDTEFP 24
 
 
 
 

L’Histoire c’est aussi ce qui nous a rapprochés. L’amour de l’Histoire Sociale et sa non prise en compte dans la société d’aujourd’hui. L’obligation de la faire passer pour toutes les générations de militants qui doivent connaître d’où nous venons pour pouvoir analyser les situations d’aujourd’hui. C’est naturellement que Cyril s’est inscrit dans notre IHS, pour participer, amener ses idées, en débattre pour faire de l’IHS un outil servant l’activité des syndicats.

 

Dans les congrès, ses interventions étaient attendues car travaillées à partir des archives des syndicats. Cela permet aux syndiqués d’aujourd’hui de savoir quelle était l’activité de leurs aînés, ce qui ne leur est pas rappelé souvent.

 

La transmission de la mémoire ouvrière est au cœur des préoccupations de Cyril. L’éclairage du passé, permet de se projeter dans l’avenir.

 

C’est à partir de ce constat que Cyril a impulsé le travail de revue historique sur la Dordogne. Essayer de rapprocher l’activité syndicale du passé au plus près de notre département.

 
 
 
 
 
 

Il faut le dire, cette initiative a toutefois rencontré des résistances, est-ce pour les mêmes raisons qui m’ont fait au départ me méfier de Cyril ? Je ne sais pas et je ne préjugerai pas. Mais je dois dire, faisant partie du projet avec d’autres camarades, adhérents à l’IHS de la Dordogne, que ces bâtons lancés dans les rouages auraient pu avoir pour effet l’annulation pure et simple de cette initiative. Avec opiniâtreté Cyril a maintenu le cap, épaulé par les camarades qui ont mis en œuvre cette initiative. Aujourd’hui nous travaillons sur un rythme d’une revue par an. Après 36 et 68 en Dordogne, la prochaine sera sur une période importante de notre syndicalisme, la période de 1944 à 1947. Les sources ne manquent pas. C’est aussi ce qui nous a été reproché, la question des sources. Si cette question se pose effectivement, la non exploitation de celles-ci nous permet de penser que nous avons encore assez de matériel pour travailler dessus pendant quelques années avec des thèmes différents. Pour ceux qui seraient dubitatifs, je vous cite le Cahier de l’Institut CGT d’Histoire Sociale qui dans son numéro de décembre 2018 disait de notre revue sur 68 : « La construction de ce numéro permet de faire alterner des articles courts sur le contexte Périgourdin des grèves […] à une série de témoignages qui éclairent le récit historique. Abondamment illustré et parfaitement référencé, ce numéro passionnant est à lire sans restriction. » Je pense que Cyril a pesé pour une part importante sur l’analyse de l’IHS National de notre revue.

 
 
 
 
 
 

Je suis déjà un peu long, mais je voudrais dire aussi que cette bibliothèque, dans cette salle a vu le jour sous l’impulsion de Cyril, qui, avec l’histoire, a l’éducation ouvrière au cœur. La culture ne se décide pas dans notre parcours scolaire mais prend essor dans la lecture d’ouvrages CGT, d’ouvrages du mouvement ouvrier et dans les débats dans notre CGT.

 

C’est tout cela qui fait qu’aujourd’hui je suis ému par le départ d’un camarade de valeur qui, si elle pèsera sur notre activité en Dordogne, rayonnera, je l’espère, dans l’Ariège.

 

Il ne me reste plus qu’à te dire Cyril, bon vent syndical, et permets-moi ces phrases que nous lisons régulièrement dans nos archives.

Vive Cyril,

Vive la CGT

Et pour une fois, spécialement pour toi : Vive la FSM !